L' oestrose ovine
RUMINER OU RESPIRER?
L'oestrose est une affection parasitaire des cavités nasales et sinusales du mouton provoquée par les larves d'une mouche: Oestrus ovis. Cette myiase naso-sinusale est à l'origine d'une rhinite estivale et d'une sinusite hivernale. Elle sévit sous forme enzootique dans le sud de la France mais également plus au nord (Limousin, Région Centre).
Cycle biologique d'Oestrus ovis
Le cycle biologique d'Oestrus ovis se divise en deux phases: une phase parasitaire avec infestation des cavités nasales et sinusales du mouton par les larves, et une phase libre au cours de laquelle se déroule la pupaison et la vie d'insecte adulte.
Phase libre
Les mouches, de couleur gris jaunâtre à tète globuleuse mesurent environ 12 mm.
Après la reproduction, les femelles fécondées recherchent activement les moutons pour déposer aux commissures nasales des larves de premier stade (Ll). Cependant, on ne sait pas encore exactement comment les mouches détectent l'orifice des cavités nasales des moutons. Il semblerait que ce repérage soit le résultat d'une combinaison de stimuli olfactifs et visuels. De plus les mouches ne sont pas actives dans les locaux sombres (bergeries par exemple). L'infestation se fait donc au la journée. Le troupeau pâturage, aux heures
chaudes de adopte alors une attitude caractéristique consistant en un port de tète au ras du sol et en un enfouissement des naseaux dans la toison de leur voisin pour se protéger de l'agression des mouches.
Phase parasitaire
Les L1, pondues par la mouche, sont directement infestantes et pénètrent activement dans lescavités nasales. Puis, elles migrent plus profondément jusqu'aux sinus. Cette migration s'accompagne de mues successives en larves de deuxième (L2) puis troisième stade (L3).
Les L3 en position sinusale, n'atteignent leur maturité qu'après avoir accumulé suffisamment de réserves énergétiques. Dès lors elles retournent dans les cavités nasales d'où elles sont expulsées par les éternuements des animaux. Une fois sur le sol elles s'enfouissent et débutent la pupaison au cours de laquelle elles se transforment en mouche.
La rapidité d'évolution des larves au sein du mouton varie suivant les saisons, les pays et l'intensité de l'infestation. En conditions optimales, l'évolution de L1 à L3 prend quatre semaines. Lorsque les conditions sont défavorables (hiver des pays tempérés et mediterranéens ou saison sèche des pays tropicaux) les larves de premier stade entrent en hypobiose: leur développement est alors interrompu en attendant l'amélioration climatique. Ce comportement adaptatif se répercute sur la démographie saisonnière des larves infestantes chez le mouton. En " hiver (septembre à janvier) presque 100 0/o des larves présentes dans les cavités nasales sont des larves de premier stade dont le développement est interrompu. Lorsque les conditions climatiques redeviennent favorables (Février - Mars - Avril) ces L1 reprennent leur évolution en stades 2 et 3: c'est la levée d'hypobiose. De Mai à Juillet les populations des différents stades larvaires s'équilibrent puis les L1 redeviennent prépondérantes à partir de lin Août.
Impact sur la pathologie respiratoire et les productions animale
La présence des larves d'Oestrus ovis dans les cavités nasales se traduit par une forte réaction inflammatoire consécutive à la mobilisation d'un grand nombre de cellules réactionnelles de l'immunité telles que les éosinophiles et les mastocytes. Cette réaction est de type allergique et conduit à l'apparition de signes cliniques évocateurs de l'oestrose. Les écoulements nasaux sont un des signes cliniques les plus manifestes. Le jetage est, au début de la maladie, clair et filant puis évolue vers une consistance plus visqueuse, collante et purulente. C'est pourquoi il n'est pas rare de constater une obstruction quasi totale des narines consécutivement à la fixation de poussières et de brins de paille sur ces écoulements. On comprend aisément que les animaux s'en trouvent fortement perturbés dans leur alimentation et leur rumination, dans la mesure où il leur faut choisir entre respirer par la bouche ou s'alimenter. L'oestrose est donc à l'origine de pertes variant de 1,1 à 4,6 kg de viande, 200-500 g de laine et jusqu'à 10% de lait.
De plus, l'oestrose peut, en hiver, être à l'origine de complications graves au niveau de voies respiratoires plus profondes. En effet les larves favorisent le développement de foyers infectieux qui risquent de se propager jusqu'aux poumons entraînant des abcèdations pouvant conduire à la mort de l'animal.
L'oestrose est donc économiquement inacceptable pour l'éleveur d'où la nécessité de lutter contre cette myiase.
L'oestrose: prophylaxie et traitement
Actuellement il n'existe pas de moyens efficaces pour lutter contre les populations d'Oestrus ovis adultes: il n'y a pas de piégeage possible. La totalité de l'effort de guerre" est donc tourné vers le contrôle des populations larvaires.
L'approche vaccinale est encore prématurée mais semble être une alternative intéressante. En effet, de récentes études indiquent que les larves libèrent des molécules corrosives (protéases) qui seraient impliquées dans leur nutrition aux dépens du mouton. On peut espérer en bloquant l'activité de ces molécules, empêcher les larves d'accumuler des réserves énergétiques et donc d'atteindre leur maturité.
Pour l'heure le seul contrôle possible de l'oestrose repose sur une prévention efficace par un traitement antiparasitaire systématique. Il faut donc surveiller le troupeau, notamment en détectant les signes d'énervement au pâturage et surtout en recherchant les premiers écoulements nasaux. Un dépistage sérologique (technique ELISA) peut également se révéler être un bon indicateur de la prévalence (nombre de moutons séro+ /nombre de moutons total) de l'oestrose au sein du troupeau. Il serait également intéressant de comparer ces prévalences entre exploitations de façon à mettre en place un système de prévention concerté et commun à une zone où les mouches sont présentes.
Quand et comment traiter?
Pour les troupeaux peu infestés, un seul traitement en début d'hiver peut suffit. Plus généralement il convient d'appliquer deux traitements. Le premier traitement devra être effectué au cours de l'été de façon à éliminer les stades en évolution ou à lutter contre les réinfestations par les L1. Le second s'appliquera à la rentrée des animaux en bergerie au début de l'hiver de façon à les débarrasser des éventuelles L1 transhivernantes.
La majorité des douvicides sont efficaces vis à vis des larves d'Oestrus ovis. Cependant de nouvelles molécules telles que la doramectine, dorénavant applicable aux ovins, offrent l'avantage d'être efficaces sur un plus grand nombre d'espèces de parasites: la gale, les oestres, mais aussi les strongles gastro-intestinaux et pulmonaires.
La doramectine présente l'avantage d'être recommandée par voie intramusculaire et sous-cutanee. Sa posologie est de 0,2 mg/kg soit 1 ml pour 50 kg.